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Grands projets : une véritable transformation

Par François.BAMBOU - Publié en novembre 2017
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Malgré les obstacles, l’État est déterminé à mettre en oeuvre son programme d’investissements dans les infrastructures.

Les négociations entre le Cameroun et le Fonds monétaire international (FMI) en vue de la signature d’un nouvel accord triennal n’auront pas été simples. Quelques divergences de fond subsistaient quant à l’opportunité ou non de poursuivre l’ambitieux programme d’infrastructures engagé par le Cameroun dans le cadre de sa marche vers l’émergence. Pour l’institution, il faudrait mettre un bémol aux ambitions du Cameroun dans le domaine des infrastructures, car la chute des cours internationaux des matières premières ont réduit les ressources de l’État. 
De plus, la guerre contre les terroristes de Boko Haram dans l’Extrême-Nord nécessite une nouvelle affectation de ressources dans le domaine de la sécurité. Un message déjà énoncé par Christine Lagarde, la directrice générale du FMI lors de sa visite au Cameroun, a qui a été répété avec insistance par Mitsuhiro Furusawa, le directeur général adjoint du FMI, le 15 septembre dernier à Yaoundé : « L’économie camerounaise étant la plus diversifiée de la région de la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale), elle s’est avérée plus résiliente. Mais du fait des grands projets dans les infrastructures et de l’augmentation des dépenses de sécurité, les réserves budgétaires et extérieures diminuent rapidement. L’an dernier, votre pays a fait face à un ralentissement de la croissance, à une aggravation des déséquilibres budgétaires et extérieurs, ainsi qu’à une augmentation rapide de la dette publique », expliquait l’économiste face à un imposant parterre de membres du gouvernement. Il ajoutait que « la santé économique du Cameroun est relativement meilleure que celle de ses voisins, mais il n’en est pas moins essentiel de poursuivre les réformes ». Le gouvernement a donc opté pour un redimensionnement du portefeuille des projets pour les ajuster à la capacité d’absorption des financements extérieurs. Il s’agit pour les autorités de mener à bien les projets déjà inscrits dans le portefeuille de l’État tout en préparant les grands, ceux de seconde génération. Les experts camerounais soulignent ainsi que ce regain de volontarisme économique sur ces derniers, associé à une politique active d’appuis directs au secteur privé, stimulerait la production à court terme, tout en dopant la demande globale. De quoi augmenter la capacité productive de l’économie dans la durée. Ils s’inspirent d’ailleurs d’autres analyses du Fonds monétaire, selon lesquelles la massification des investissements publics dans les infrastructures donne au PIB une impulsion qui compense l’accroissement de la dette, de sorte que le ratio dette publique/PIB ne progresse pas.
 
Améliorer le climat des affaires
Car si l’absence d’infrastructures fait perdre des points de croissance au pays, la réalisation des grands projets qui améliorent la performance de l’économie permet également de générer les ressources nécessaires au remboursement des emprunts contractés. C’est le cas, par exemple, du port de Kribi. Dans le cadre de ces projets de seconde génération, les autorités entendent privilégier les engagements productifs avec un accompagnement soutenu des pouvoirs publics, parallèlement à la poursuite des réformes visant l’amélioration du climat des affaires pour faire progressivement de l’investissement privé, un relais du financement public. Si le gouvernement camerounais a tenu à poursuivre son programme de développement des infrastructures, c’est aussi parce qu’à l’analyse, les bonnes performances réalisées par le pays dans ce contexte de crise sont attribuées à la mise en oeuvre du volet infrastructures du Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (DSCE), comme l’explique le ministre de l’Économie, Louis Paul Motaze : « Il y a lieu de reconnaître que depuis 2010, date de mise en oeuvre du DSCE, le Cameroun est passé d’une mollesse économique à une certaine vigueur, avec un taux de croissance projeté à 5,9 % cette année. En effet, grâce aux changements et transformations économiques induites par la mise en oeuvre du DSCE, notamment à travers le Programme de grands projets adossés à l’axe stratégique n°1 portant sur le développement des infrastructures, l’économie camerounaise a été plus résiliente face aux divers chocs. » Le ministre cite ainsi des réalités inattendues comme le coût élevé de la guerre contre la secte terroriste Boko Haram ; la conjoncture internationale de moins en moins stable avec notamment la Chine, qui s’emploie à revisiter son modèle économique, la baisse prolongée des cours des matières premières, en l’occurrence le pétrole, et le durcissement des conditions d’emprunt. Des facteurs contraignants auxquels il faut ajouter la persistance des dérèglements climatiques, surtout dans la région de l’Extrême-Nord, et l’afflux des réfugiés sur le territoire, dont la prise en charge a un coût économique et social lourd pour les pays. C’est pourquoi, insiste Louis Paul Motaze, « conformément à la vision du chef de l’État, nous devrions nous engager dès à présent, au lancement d’un Programme de grands travaux de seconde génération, qui devrait prendre le relais de celui qui est en cours d’achèvement. Nous pensons ici aux projets tels que la construction des lignes ferroviaires conformément au Schéma ferroviaire national approuvé en 2011, du troisième pont sur le Wouri, du port de Limbé, ou encore de la densification de la fibre optique sur tout le territoire national ».