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Musique

Afel Bocoum

Par Sophie Rosemont - Publié en septembre 2020
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Pour attendre des jours meilleurs D’une élégance rare, le NOUVEL ALBUM du chanteur et guitariste malien impose un regard tendre sur un monde brutal.

SON PÈRE était un célèbre joueur de njarka mais ne souhaitait guère que son fils suive ses pas dans la musique… Heureusement, Afel ne l’a pas écouté et, dès le plus jeune âge, reçoit l’enseignement d’Ali Farka Touré tout en écoutant l’appel de la guitare et de ce qui l’entoure, les tambours du Gumbé comme les flûtes des Fulani. Devenu membre du groupe de Touré, il fait ses armes sur scène dans les années 1980, gagnant sa vie en tant qu’agent gouvernemental de l’agriculture tropicale et animateur culturel pour le ministère de la Jeunesse. Il organise des concerts, fonde le festival Alkibar… En 1999, il sort enfin son premier album, Alkibar, où l’on entend chanter en bambara, en tamasheq et en sonrhaï, la langue des Peuls du Mali. Il y raconte l’Afrique, la liberté, le partage des cultures, la solidarité. Trois ans plus tard, Damon Albarn et Toumani Diabaté lui demandent de participer à Mali Music.

Des liens se tissent et, depuis, Bocoum joue régulièrement lors des concerts d’Africa Express. Le meneur de Blur et de Gorillaz est d’ailleurs coproducteur exécutif de Lindé, aux côtés de Nick Gold du label World Circuit. L’album tient son nom d’une étendue sauvage située près de Niafunké, ville natale de Bocoum, dans la région de Tombouctou. L’eau y est très présente, et sa transparence se retrouve dans les entrelacs mélodiques et la douceur rythmiques de Lindé, où se mêlent kora, calebasse, guitares, percussions et n’goni. Fidèle à la tradition mais inspiré par les sons occidentaux, Afel Bocoum y chante son amour pour le Mali, son désir de paix face aux profondes blessures de la guerre civile, sa volonté de dialoguer avec les terroristes – sans oublier la joie d’être au monde. Autour de lui, une fine équipe de musiciens : feus Tony Allen et Hama Sankaré (ce dernier a été tué lors d’un attentat en mars dans le nord du Mali), la rockeuse Joan Wasser, Vin Gordon (qu’on a vu chez Bob Marley and the Skatelites), Garba Touré de Songhoy Blues, Madou Sidiki Diabaté… Tous apportent leur chaleur humaine à un disque qu’il faut écouter en boucle, longtemps, pour en saisir la magie et attendre sagement des jours meilleurs