Agriculture : Le défi de la transformation
Cacao, anacarde, palme, banane, ananas, coton… Il s’agit d’aller au-delà des matières premières. Tout en assurant l’AUTONOMIE ALIMENTAIRE du pays.
La donne n’a pas changé depuis l’indépendance en 1960. Le secteur agricole constitue l’un des piliers majeurs de l’économie et représente l’un des principaux pourvoyeurs d’emplois avec plus de 5 millions de personnes en activité, dont 33 % pour les cultures de rente.
Mais, au-delà du potentiel naturel important et des remarquables résultats en matière de développement agricole, la locomotive de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) veut franchir un autre palier. À savoir accélérer l’industrialisation de son agriculture.
Dans ce sens, au niveau du cacao, premier produit d’exportation du pays, l’extension d’une usine de broyage à Yopougon qui sera la plus grande unité de transformation de fèves de cacao au monde, avec une capacité de 170 000 tonnes – a été inaugurée mardi 2 novembre 2021. La Côte d’Ivoire ambitionne d’atteindre une capacité de broyage de plus de 950 000 tonnes à l’horizon 2022 sur une production annuelle moyenne de 2 millions de tonnes.
En outre, le taux de transformation de l’anacarde s’améliore et se rapproche en 2021 de 15 % de la production nationale, contre moins de 10 %, il y a de cela deux ans. Le Projet de promotion de la compétitivité de la chaîne de valeur de l’anacarde (PPCA) – financé par la Banque mondiale – qui a permis l’installation d’unités industrielles dans différentes zones, va aider à relever ce taux. Le domaine du coton n’est pas non plus en reste, avec la relance de l’industrie textile à Korhogo, Bouaké, Dimbokro et Agboville. Selon l’Organisation interprofessionnelle agricole de la filière coton (Intercoton), la campagne 2021-2022 s’annonce historique, avec une production de plus de 580 000 tonnes. Ce résultat sera réalisé par les 132 000 producteurs que compte la filière. En 2020-2021, la Côte d’Ivoire, avec 520 000 tonnes, a été le second producteur africain d’or blanc, derrière le Bénin (730 000 tonnes), mais devant le Burkina Faso (492 600 tonnes) et le Mali (147 200 tonnes). Le coton est le quatrième contributeur aux recettes d’exportation agricoles, après le cacao, le caoutchouc naturel et la noix de cajou.
S’agissant du riz, une denrée de grande consommation, dans le Plan national de développement (PND) 2021-2025, le gouvernement prévoit, entre autres, de faire évoluer l’autosuffisance de 70 à 100 % ; d’améliorer la croissance du produit intérieur brut (PIB) courant rizicole en le portant de 4 % en 2021 à 12 % à l’horizon 2025 ; ainsi que de faire évoluer l’accroissement annuel moyen de la production de riz blanchi de 50 à 90 % sur la période 2021-2025. De façon opérationnelle, il s’agira, d’une part, de construire et d’équiper les 20 pôles rizicoles et, d’autre part, d’améliorer l’approche de la mécanisation et l’acquisition de matériel. Tout en mettant l’accent sur l’accès aux femmes dans l’exploitation des périmètres irrigués.
Par ailleurs, selon le Premier ministre, Patrick Achi, dans la recherche d’une autosuffisance alimentaire en matière de poisson d’ici à 2025, le programme stratégique pour la transformation de l’aquaculture devrait être lancé fin 2021. Car, le pays importe pour 325 milliards de francs CFA de produits halieutiques chaque année.
GAGNER DES PARTS DE MARCHÉ À L’INTERNATIONAL
Le gouvernement s’engage, dans le cadre du PND 2021- 2025, à agir simultanément sur deux autres axes stratégiques. Le premier se focalise sur l’amélioration de la compétitivité des produits issus de la production végétale et animale. Cela concerne l’ensemble des étapes du processus : semences, irrigation, mécanisation, techniques culturales, fertilisation, transports, stockage, maîtrise de la qualité. Le second concerne la bonne intégration de l’agro-industrie dans les circuits de distribution et de commercialisation mondiaux, qui permettra de gagner des parts de marché à l’export, via des débouchés performants et sécurisés en Europe, en Amérique et en Asie, tout en profitant des opportunités des marchés qu’offre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Si les autorités veulent créer des richesses équitablement partagées, à partir de l’agriculture, elles souhaitent également assurer la sécurité alimentaire pour l’ensemble des populations. Elles ont en mémoire la colère des Ivoiriens, lors du premier semestre 2021, face à la cherté de la vie. De nombreux ménages n’avaient alors cessé de dénoncer le coût élevé des denrées de première nécessité. Certes, ce constat a été identique dans la plupart des pays importateurs, au lendemain de la pandémie mondiale de Covid-19. Mais face à cette situation, le gouvernement souhaite proposer une solution stable, en garantissant la compétitivité et la durabilité de l’agriculture. Dans cette optique, à travers le PND 2021-2025, l’État envisage d’accroître considérablement la production annuelle des cultures vivrières : de 1 127 789 tonnes à 1 393 951 tonnes pour le maïs, de 7 932 872 tonnes à 9 463 339 tonnes pour l’igname, de 6 194 600 tonnes à 8 064 107 tonnes pour le manioc, et enfin de 2 105 095 tonnes à 2 548 107 tonnes pour la banane plantain. Il s’agira donc de produire suffisamment afin de rendre les produits vivriers accessibles et moins chers. Et ainsi, il sera possible de limiter la dépendance du pays avec les nations extérieures. En guise d’exemple, la Côte d’Ivoire a eu besoin de 2,2 millions de tonnes de riz en 2020. Sa production nationale étant estimée à 1,3 million de tonnes, elle a déboursé 317 milliards de FCFA pour importer les 900 000 tonnes manquantes.
Enfin, le pays génère 5 000 tonnes de produits halieutiques par an, mais il a besoin de 500 000 tonnes de poissons sur la même période. Le gouvernement veut donc accroître et rendre compétitives les productions animales et halieutiques, toujours afin de réduire la dépendance vis-à-vis de l’extérieur.