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Découverte / Côte d’Ivoire

Ambroise N’Koh
«Revenir à une agriculture de proximité»

Par Dominique Mobioh Ezoua - Publié en octobre 2023
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Ambroise N’Koh. NABIL ZORKOT
Ambroise N’Koh. NABIL ZORKOT

À 70 ans, il est connu pour ses méthodes agronomiques et biologiques, et porte le projet PROMIRE à l’échelle de l’Agnéby-Tiassa.

AM: Vous vous inscrivez dans le développement durable.

Ambroise Nkoh: Oui. Il faut revenir à une agriculture de proximité. C’est l’homme qui, en produisant à outrance, détruit la Terre. Et l’agriculture biologique n’est autre que l’agriculture de nos grands-mères.

Qu’est-ce que l’agriculture biologique et l’agroforesterie?

L’agriculture biologique consiste à lutter contre les nuisibles en utilisant des alternatives à l’agriculture moderne. Il y a les méthodes agronomiques et biologiques en cacaoculture pour lutter contre certaines maladies: il s’agit de planter des arbres ou des plantes qui vont les contrer. L’agroforesterie associe arbres, agriculture et élevage pour récréer un microclimat là où la main de l’homme est passée. Les arbres forestiers fixent l’azote et sont de véritables puits de carbone.

Appartenez-vous à une coopérative?

Je suis pour une agriculture intensive capable de préserver l’environnement et la forêt. Je fais du cacao 100% biologique: la tablette à 70% faite par Axel-Emmanuel, le chocolatier ivoirien; la marque Treegether, développée par le Suisse Fabien Coutel. Je produis au moins 70% des biopesticides, et j’utilise différents types de fourmis pour une gestion intégrée des nuisibles. Je me bats en ce moment pour créer le collectif des coopératives biologiques de Côte d’Ivoire. C’est dans ce sens que j’ai été coopté par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture en tant que point focal dans l’Agnéby-Tiassa à travers le projet PROMIRE, pour vulgariser cette méthode 100% bio. Mais celle-ci coûte plus cher que l’agriculture conventionnelle. En ce qui me concerne, je vends mon cacao biologique et haut de gamme à 3000 FCFA le kilo sur les marchés de niche au plan national et à l’international.

Comment booster la consommation dans le pays?

Les Occidentaux ne peuvent pas se passer du chocolat. Pourquoi? Parce qu’ils sont addicts à l’endorphine. Mais en Côte d’Ivoire, on n’en mange pas! Or, on peut en faire un aliment à consommer régulièrement, au niveau des cantines scolaires par exemple, pour garantir le succès des futurs marchés locaux.

Ainsi, il existe de nombreuses possibilités de transformation?

La chaîne de valeur permet de confectionner de nombreux sous-produits: le biocompost, la potasse ou le charbon de coques de cacao pour lutter contre la déforestation. Dans le domaine de la beauté, on peut notamment utiliser de la potasse, du beurre ou des fèves pour faire du savon.

A-t-on la technologie nécessaire pour transformer le cacao?

Absolument. Il ne faut pas se contenter de cueillir, écabosser, fermenter, sécher et vendre les fèves. On peut commencer par une semitransformation de la matière première. La Côte d’Ivoire est le premier producteur et broyeur au monde. Mais il n’existe pas d’université dédiée aux sciences du cacao et du café. On pourrait aussi, à l’instar de la journée du Beaujolais nouveau en France, instituer la journée des crus du cacao!.