Assimi Goïta :
un leader discret mais ambitieux
Jeune et brillant officier, le nouvel homme fort du Mali a renversé, sans un coup de feu, deux présidents en moins d’un an. Omniprésente dans le vocabulaire de la junte, la « transition », supposée prendre fin en février, pourrait s’éterniser.
Sa biographie officielle, distribuée aux médias par la junte, le présente comme un homme « rigoureux, tenace, adepte des défis et apte au commandement ». Fils de militaire, Assimi Goïta, que ses proches surnomment « Asso », a l’armée dans le sang. Ce colonel de 37 ans, marié et père de trois enfants, a été formé au Prytanée militaire de Kati, puis à l’École militaire interarmes (EMIA) de Koulikoro. Affecté dès 2002 dans le nord du Mali, il affronte les djihadistes algériens. Ses excellents résultats lui valent d’effectuer des formations au Gabon, en France, en Allemagne et aux États-Unis. En novembre 2015, il coordonne les opérations du ministère de la Défense après le carnage de l’hôtel Radisson Blu de Bamako (20 victimes). Au micro de RFI, un officier français évoque « un homme droit, qui ne laisse rien passer » : ni les fautes de ses subordonnés, ni les opportunités à saisir. Ainsi, en juillet 2020, alors qu’il est à la tête du Bataillon autonome des forces spéciales et des centres d’aguerrissement (BAFS-CA), une unité d’élite basée à Mopti, il est rappelé à Bamako par le président Keïta, afin de participer aux opérations de maintien de l’ordre contre le M5. On connaît la suite : le 18 août, les colonels renversent Ibrahim Boubacar Keïta. « Nous n’avons plus le droit à l’erreur », annonce la junte le lendemain de son premier putsch devant la presse convoquée au camp militaire de Kati. Assimi Goïta est propulsé « vice-président de transition », à la tête du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), le nom que s’est choisi la junte. Le colonel est discret, mais efficace : « Il est très silencieux, voire énigmatique, confie une source bien informée. C’est ce qui fait sa force et lui procure du coup un certain charisme. » Les membres du M5 applaudissent : pour le mouvement sociopolitique, le putsch couronne sa lutte contre le décrié IBK.
En août 2020, le nouveau maître du Mali s’était donné « trois années » pour remettre le pouvoir aux civils, avant de diviser ce délai par deux, face au tollé et aux sanctions de la communauté internationale. Des élections sont donc annoncées pour février 2022. Mais c’était sans compter sur le zèle du jeune colonel : le lundi 24 mai, le vice-président de transition fait arrêter le président et le Premier ministre : Bah N’Daw et Moctar Ouane avaient remanié le gouvernement sans son aval. Il les a aussitôt accusés de « sabotage de la transition ». Dans la foulée, la Cour constitutionnelle institue le double putschiste « président de transition ». « Le processus de transition suivra son cours normal, et les élections prévues se tiendront courant 2022 », promet le nouveau président dans une déclaration lue à la télévision par un militaire. Les sceptiques observeront néanmoins qu’il n’est déjà plus question de « février 2022 »…