Aller au contenu principal
FRANCESCA MANTOVANI/GALLIMARD
FRANCESCA MANTOVANI/GALLIMARD
Fiction

Au royaume de Pamanga

Catherine Faye
Publié le 20 mai 2025 à 11h24
Share

L’auteur-monde camerounais, Eugène Ébodé, revient avec un roman foisonnant, en hommage à l’énergie créative comme force de résistance.

EUGÈNE ÉBODÉ, Zam-Zam, Gallimard, «Continents noirs», 112 pages, 15 €.DR
EUGÈNE ÉBODÉ, Zam-Zam, Gallimard, «Continents noirs», 112 pages, 15 €. DR

En dédiant son onzième roman à Néfertiti, l’écrivain ravive la mémoire de celle qui fut l’une des femmes les plus puissantes et les plus influentes de l’Égypte ancienne.
La belle dame du Nil vient insuffler à la princesse Onisha, l’héroïne, l’insolence face au pouvoir, la vitalité de l’imagination et la capacité à utiliser la beauté comme arme politique. Face à cette figure de la résistance créative, Zam-Zam, héros masculin éponyme de l’ouvrage, incarne une autre forme d’opposition, tout en muscles, plus instinctive. Pourtant, cet homme au crâne de pierre séduit la princesse. Dans ce récit hybride, la satire picaresque, le drame sentimental et le réalisme magique s’entremêlent pour former un livre inclassable, à la fois prose poétique et roman de moeurs. L’auteur de La Rose dans le bus jaune, de Souveraine Magnifique, Grand prix littéraire d’Afrique noire en 2015, et du Balcon de Dieu, y tisse une fable politique, où Pamanga, le royaume fictif dans lequel se déroule l’histoire, est la cible d’une double menace: un incendie apocalyptique et, surtout, une mystérieuse maladie qui foudroie quiconque sombre dans la tristesse, comme une allégorie du syndrome post-Covid-19, où une foi inébranlable dans la puissance transformatrice de l’art viendrait sauver le monde face à l’adversité et au pessimisme. «Notre siècle enflait de colères mal éteintes et de postures absurdes. Les premières concernaient ce que nous devions manger, et les autres l’avenir de l’air que nous avions bousillé. Entre ces deux maux qui nous effrayaient, je ne parvenais plus à écrire le moindre vers, la moindre pensée à peine ébauchée me crispait; une rage indescriptible m’empoignait.» Qu’à cela ne tienne. L’écrivain, également administrateur de la chaire des littératures et des arts africains de l’Académie du Royaume du Maroc, a pris les choses en main.
Cet inconditionnel d’Eugène Onéguine, de Pouchkine, s’est adjoint les forces narratives de Roméo et Juliette et des Mille et Une Nuits pour poétiser nos existences et inviter les imaginaires et le rire à faire fi de toutes les frontières.