Aller au contenu principal
Business

« Élu Service Client de l’Année » :
un label pour tirer vers le haut les services au Sénégal

Par Shiran Ben Abderrazak - Publié le 20 janvier 2025 à 13h51
Share
Le lancement de la 1ère édi­tion de l’Élection du service client de l’année (Escda), Sénégal. Client Centric Vision
Le lancement de la 1ère édi­tion de l’Élection du service client de l’année (Escda), Sénégal. CLIENT CENTRIC VISION

Le Sénégal devient le premier pays d’Afrique subsaharienne à accueillir le label  « Élu Service Client de l’Année ». Une initiative ambitieuse portée par Client Centric Vision visant à récompenser les entreprises offrant une qualité de service exemplaire. Mais derrière l’annonce, plusieurs questions demeurent : quels avantages concrets pour les entreprises ? Quels défis pour ce marché ?

Un investissement stratégique

Pour participer à l’évaluation, les entreprises doivent s’acquitter de 6 500 000 XOF. Ce montant inclut l’ensemble des audits et tests nécessaires pour évaluer leur service client. Cependant, la candidature nécessite également une infrastructure adaptée : il est impératif que les entreprises disposent d’un service client suffisamment étoffé pour absorber les flux entrants générés par les enquêtes du label, sans risquer de fausser les résultats ni de surcharger leurs équipes.

« Un label extérieur apporte une crédibilité essentielle, surtout pour des entreprises comme la nôtre », explique Ronan Nicot, directeur général adjoint de Seter, opérateur du TER Dakar-Diamniadio-AIBD, accompagné de Idrissa Gueye, directeur adjoint au développement commercial. Pour Seter, la participation représente une occasion unique de montrer le travail qui est mis en œuvre, tout en renforçant l’image de marque de l’entreprise : « Ce label permet non seulement de rassurer notre partenaire principal, l’État, mais aussi de démontrer notre capacité à atteindre l’excellence auprès des usagers », conclut Ronan Nicot.

Une méthodologie adaptée

Logo de l'Escda en Wolof. Client Centric Vision
Logo de l'Escda en Wolof. 
​​​​​​CLIENT CENTRIC VISION

Le label repose sur une méthodologie éprouvée. Chaque entreprise participante est soumise à 120 tests mystères sur plusieurs mois. Téléphones, e-mails, visites physiques ou réseaux sociaux : tous les canaux sont examinés. L’objectif ? Identifier les forces et les axes d’amélioration des entreprises, tout en offrant aux lauréats une reconnaissance qui valorise leur engagement envers leurs clients.

Un rapport détaillé est ensuite remis à chaque participant, identifiant leurs points forts et leurs axes d’amélioration. Cette approche permet non seulement de récompenser les meilleurs, mais aussi d’accompagner toutes les entreprises dans une démarche d’amélioration continue et d’offrir un benchmark par catégorie, ce qui permettra aux entreprises de se positionner dans leur secteur. Mais cette grille internationale a dû être ajustée.

« Nous avons adapté les critères aux attentes des consommateurs sénégalais, comme la courtoisie ou le respect ou encore le timing de prise en charge », souligne Aminata Diop, managing partner de Beyond, partenaire de la mise en œuvre du label. Elle insiste également sur l’importance de bien comprendre les spécificités locales : « Il faut comprendre le consommateur sénégalais. Il y a de nouvelles tendances qui émergent dans l'affirmation de soi, dans le fait d'assumer notre africanité. Et il est important de créer une équation : l’importation de ce label de la France, certes, mais aussi et surtout l’intégration de tous ces codes culturels qu'il faut prendre en compte pour apporter du crédit à ce label au Sénégal ».

Un contexte économique morose

L’arrivée du label intervient à un moment où le Sénégal traverse une période de ralentissement économique. La transition politique en cours, marquée par des audits approfondis initiés par le nouveau gouvernement, a engendré une certaine incertitude pour les entreprises.

Ces audits, bien qu’indispensables pour assainir l’économie, freinent momentanément les investissements et ralentissent les activités dans plusieurs secteurs-clés. Ce contexte rend le lancement de ce label d’autant plus stratégique : il offre aux entreprises une opportunité de se démarquer et de rassurer leurs partenaires en prouvant leur engagement pour l’excellence, malgré une conjoncture difficile.

« Le label est un moyen de montrer que, même dans un contexte exigeant, les entreprises sénégalaises peuvent exceller et atteindre des standards internationaux », observe Sofya Nadifi Kettani, fondatrice de Client Centric Vision. Pour elle, il s’agit pour les entreprises de montrer qu’en investissant dans la montée en compétence de leurs collaborateurs elles prennent en compte l’essentiel : la satisfaction des consommateurs.

Des défis à surmonter

Convaincre les entreprises locales de participer reste un défi majeur. Si les multinationales connaissent déjà ce type de certification, la mobilisation des acteurs sénégalais, souvent moins familiers avec de tels standards, est pourtant essentielle pour réussir cette première édition.

Autre enjeu : impliquer les institutions publiques. Leur soutien pourrait non seulement renforcer la légitimité du label, mais aussi encourager une adhésion plus large : « Nous espérons voir des administrations intégrer cette démarche, comme cela se fait dans d’autres pays », confie Ludovic Nodier, créateur du label : « en effet, celles-ci peuvent simplement soutenir avec bienveillance l’initiative, ou en devenir partie prenante, comme dans d’autres pays où il existe la catégorie « service public » pour évaluer la satisfaction des citoyens par rapport à leurs relations avec leurs administrations ».

Un projet ambitieux

Avec un budget global de 133 millions de XOF, l’implantation du label au Sénégal ne manque pas d’ambition. Pour Sofya Nadifi Kettani : « il s’agit de prouver que les entreprises sénégalaises peuvent rivaliser avec les meilleures pratiques mondiales ». Pour elle : « cela suffit de s’entendre dire : "il faut être compréhensif, on est en Afrique". Au contraire, nous devons redoubler d’exigence car nous pouvons et devons être au même niveau d’excellence que dans le reste du monde ».

Au-delà de la reconnaissance, le label propose une opportunité unique : placer le Sénégal au centre de la carte africaine de l’excellence en service client. Une étape essentielle dans un monde où la relation client devient un critère de différenciation-clé.

Un avenir prometteur

Si cette initiative rencontre son public, elle pourrait devenir un catalyseur pour transformer la qualité des services au Sénégal. En conciliant standards internationaux et attentes culturelles locales, le label « Élu Service Client de l’Année » pourrait bien ouvrir la voie à une nouvelle ère d’excellence et de compétitivité.

Le verdict tombera en novembre 2025, lors de la cérémonie de remise des labels aux entreprises victorieuses.