Prosélyte de l’humour

«Merci de choisir une autre religion. » C’est la prière que Samia Orosemane adresse aux jihadistes dans une vidéo hilarante, vue plus de 700 000 fois sur les réseaux sociaux. C’était en octobre 2014, bien avant les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, à Paris, en janvier dernier. Depuis, la diva de la dérision est de tous les plateaux télé et « désamorce les peurs par le rire » avec Femme de couleurs. Son spectacle pertinent et percutant qu’elle joue sur les planches parisiennes du Point Virgule jusqu’en juin prochain. Cette Franco-Tunisienne, formée au Conservatoire de Paris, y tord le cou aux tabous et aux communautarismes en puisant dans le quotidien et l’actualité qui la touchent. Née dans le 9e arrondissement de la capitale française, elle a grandi en banlieue et s’est inspirée de ses parents pour créer plusieurs personnages de son stand-up. Mais en se réclamant de l’humour et de l’islam, la comique impose surtout une personnalité déroutante et atypique. Car Samia est musulmane et pratiquante, elle l’affiche et le dit sans prosélytisme. Elle en fait même une liberté : « Couvrir son corps, décider de montrer ce que l’on veut, à qui l’on a envie, c’est aussi une forme de féminisme. » À 34 ans, celle qui savait depuis le collège qu’elle ferait du théâtre milite pour le vivre ensemble et voue une authentique passion à l’Afrique, au point d’adopter les boubous et les turbans plutôt que le voile, dont l’image la dérange. « C’était un bon compromis » estime Samia, qui s’est rendu compte que « les barrières étaient dans [sa] tête » et a fait fi des préjugés. Elle a également défié les a priori racistes en épousant un Martiniquais converti à l’islam. Alors qu’elle campe avec truculence des femmes africaines, dont elle imite les postures avec talent, l’humoriste prévoit de s’envoler bientôt pour une tournée sur le continent. Exubérante, Samia ne s’impose qu’une limite, celle de ne jamais blesser.