Rentrée Littéraire du Mali 2025 :
«Quand l’Afrique se raconte à elle-même et au monde»
La Rentrée littéraire du Mali 2025, se tient du 18 au 22 février. AM a échangé avec Ibrahima Aya, son organisateur et co-fondateur.
Ibrahima Aya est auteur (Les Larmes de Djoliba, Cercle/Amap, 2003, Rires et pleurs des orphelins, Éditions L’Harmattan, 2011), et en 2008, il fonde sa propre maison d’édition : Les éditions Tombouctou. Cette création fait suite à une véritable prise de conscience lorsqu’il réalise avec stupéfaction que seulement quatre livres de fiction ont été publiés au Mali cette année-là. C’est un choc pour le jeune éditeur :
« Un pays de culture et d’histoire tel que le Mali, c'était scandaleux de constater cela. Cela m’a choqué de voir qu’un pays tel que le nôtre ne se donnait pas les moyens de publier ses propres livres ».
Il poursuit : « Le problème, c’est que nous sommes racontés par des livres qui sont produits hier et écrits ailleurs ! ». D’où le slogan fort de cette première Rentrée littéraire du Mali qu’il fonde la même année, en 2008 : « Quand l’Afrique se raconte à elle-même et au monde ».
Depuis 2008 et cette première édition du festival, on compte une cinquantaine d’ouvrages de fiction publiés chaque année. Un signe éclairant de l’impact positif de cette Rentrée littéraire dans les chiffres des publications, selon l’organisateur : « Un regain d’intérêt, c’est clair. L’idée de la Rentrée, c’était de mettre en avant ces acteurs du livre, pour faire émerger justement de nouveaux acteurs du monde du livre ».
« Améliorer l’offre du livre, et évidemment de la demande », continue Ibrahima Aya. Le rendez-vous annuel est donc noté dans l’agenda des auteurs et des éditeurs maliens : lieu de promotion des auteurs publiés, lieu de rencontre pour les écrivains et de discussions pour les nouveaux éditeurs émergents.
Pour penser ces rencontres, un thème central est sélectionné car, «depuis 2012, le Mali traverse une crise et on a vu que le public était en demande de clés de lecture pour comprendre la situation. On l’a vu à la progression des chiffres de l'édition de livres d’essai. Et donc, pour suivre cette idée de la clé de compréhension, on a créé un thème. »
Devenue un espace de partage et de débat sur les enjeux de société, la Rentrée littéraire n’est pas seulement dédiée à la littérature : « Le thème fait toujours écho à la situation actuelle, et à ce qui traverse l'Afrique ». Lieu de réflexion et de maturation des enjeux et des conflits qui traversent la région.
Cette année, à l’honneur, ce sont les jeunes, thème qui va édifier les débats de ces rencontres à venir.
« Il faut aussi noter que c’est un espace de débat libre et accessible, car toutes les rencontres sont en accès libre et gratuit ». Une politique qui semble fonctionner puisque, du côté des chiffres de fréquentation, le public est au rendez-vous et continue de s’élargir, selon lui :
« Dans ce regain d’intérêt, les jeunes prennent de plus en plus de place ».
Le changement-clé, depuis deux ans, c’est la Librairie de la Rentrée littéraire, la grande librairie qui permet d’accueillir libraires et éditeurs, ainsi que les dédicaces. C’est un vaste projet conçu en partenariat avec l’agence Binthily Communication, présente à Bamako :
« On travaille à développer cet espace. C’est important de se retrouver autour des livres, et tout simplement pour que les lecteurs puissent acheter directement. C’est un lieu où tout le monde se rencontre. »
Les prix littéraires ? Deux sont ouverts seulement aux auteurs maliens.
« Le Prix Ahmed Baba est le plus important. L’auteur primé reçoit 3 000 000 FCFA. »
L’année dernière, les lauréats étaient Zeïna Haidara (Mali) pour son roman "Le silence des papillons" (Éditions Gafé, 2023), Ousmane Touré (Mali) pour son roman "Hodarè" (Éditions Tombouctou, 2023), Benaouda Lebdai (Algérie) pour son essai "Afrique du Sud. Histoire et littérature" (Éditions Casbah, 2023 et L'Harmattan Guinée) et le lauréat du Grand Prix Ahmed Baba : Walid Amri (Tunisie) pour son texte "Les Papillons de Lampedusa" (Éditions Demeter et L'Harmattan, 2023).