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événement

Rétrospective Giacometti à Rabat

Par Abdeslam Kadiri - Publié en juillet 2016
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Imaginée sur mesure pour le musée Mohammed-VI, cette ambitieuse exposition se penche sur les influences des arts africains dans le travail de l’artiste italien.

Les habitants et visiteurs de Rabat sont vernis ! Jusqu’au 4 septembre, ils peuvent profiter, sous les cimaises du musée Mohammed-VI d’art moderne et contemporain (MMVI), d’une rétrospective unique consacrée à l’oeuvre d’Alberto Giacometti (1901- 1966) en Afrique. Conçue spécifiquement pour le MMVI, l’exposition, qui rassemble une centaine d’oeuvres saisissantes, embrasse les principaux axes de la carrière de Giacometti et sa production protéiforme : sculptures, peintures, dessins, objets d’art décoratif… Articulé en trois sections chronologiques, le parcours dévoile les oeuvres présurréalistes et surréalistes de Giacometti puis le retour au travail d’après nature et, enfin, la question du placement de la figure dans l’espace.
 
Après des premières années de formation en Suisse, Alberto Giacometti arrive à Paris en 1922. Il étudie à l’académie de la Grande-Chaumière, mais il est vite intéressé par les courants avant-gardistes de l’époque. En 1930, il rejoint le groupe surréaliste d’André Breton avant d’en être exclu (comme Salvador Dali) en février 1935. Entre-temps, il crée des chefsd’oeuvre comme la Femme qui marche (1932), le Palais à 4 heures du matin (1932) ou la Tête crâne (1934), dont une peinture est présentée dans l’exposition). Giacometti revient par la suite à une sculpture d’après modèle. « Ces années sont caractérisées par l’obsession de la représentation de la tête et de la figure humaine. Il demande à ses proches de poser pour lui, notamment à sa femme Annette et à son frère Diego. Ses modèles posent jour et nuit dans l’atelier, pendant des longues et épuisantes séances qui laissent l’artiste toujours insatisfait », explique Serena Bucalo-Mussely, commissaire associée de l’exposition. Les portraits en sculpture et en peinture, ainsi qu’une galerie de gribouillis de têtes, sur différents supports, témoignent de la quête inlassable de l’artiste. Dans les années de la maturité, il s’attache à restituer l’expérience de la vision. Les figures de Giacometti rétrécissent ou s’allongent pour mieux évoquer une figure se tenant au loin, comme dans La Cage (1950) et L’Homme qui marche (1960), aujourd’hui sa création la plus iconique.
 
Cette rétrospective « marocaine » souligne les influences des arts africains sur le travail de Giacometti, dévoilant des documents inédits et des oeuvres jamais présentées auparavant. « Les dessins et les esquisses tracés sur des papiers éparpillés ou aux marges des livres de sa bibliothèque montrent bien l’intérêt de l’artiste, très tôt, pour les arts d’Afrique », relève Serena Bucalo- Mussely. À Paris, à la fin des années 1920, il se lie à Carl Einstein, l’auteur de Negerplastik, et à Michel Leiris, spécialiste de l’art dogon. « Alberto n’est jamais allé en Afrique, mais il s’est nourri de ce monde lointain à travers les magazines, les ouvrages d’art et les collections des musées. À Paris, il visita fréquemment le musée de l’Homme et le musée du Louvre. » Les figures de l’art africain deviennent un répertoire de formes et de compositions qui l’accompagnent pendant toute sa vie.