Sophie Bessis : «Sortir de la civilisation judéo-chrétienne»
Dans son dernier ouvrage captivant, Sophie Bessis souligne les contresens d’une approche qui exonère l’Occident de son passé et renforce le jusqu’au-boutisme israélien. Tout en permettant aux régimes arabes d’occulter la composante juive de leur histoire.

L’historienne et journaliste Sophie Bessis poursuit une réflexion qu’elle a entamée dans L’Occident et les Autres: histoire d’une suprématie, paru en 2000, avec un nouvel opus, La Civilisation judéo-chrétienne : anatomie d’une imposture. Un titre qui trouve une résonance particulière dans un contexte mondial tourmenté et incertain. L’autrice déroule une analyse imparable, traquant une mystification qui escamote l’antisémitisme dans l’histoire européenne, écarte l’islam et fait d’Israël une enclave de l’Occident au Moyen-Orient. Une série de leurres ou d’arrangements avec l’histoire qui nourrissent les ressentiments et les dissensions qui poussent aujourd’hui une partie du monde à prendre les armes.
La notion de civilisation judéo-chrétienne n’est-elle pas un outil épistémologique et sémantique qui permet d’exclure, d’occulter, de nier?
Sophie Bessis : Cette notion est apparue relativement récemment dans le débat public. Elle a fait irruption il y a une quarantaine d’années, au début des années 1980. Il est important de contextualiser historiquement cette invasion. Jusque-là, l’expression pouvait avoir des occurrences...