Organiser la relance touristique

Si les revendications de liberté n’ont jamais été aussi fortes dans le monde arabe, les révolutions à Tunis ou au Caire ont pour l’instant fait fuir les touristes. Mi-avril, les autorités égyptiennes s’attendaient à une chute de 25 % des recettes pour la saison 2011 et pariaient sur un retour à la normale vers septembre. Avec 12,5 milliards de dollars de recettes en 2010, le tourisme contribuait à hauteur de 10 % du PIB et employait un travailleur sur huit. La destination a accueilli 14 millions de visiteurs en 2010. En Tunisie, où l’activité est estimée à 6 % du PIB (7 millions de touristes pour environ 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2010) et emploie 400 000 personnes (sur 10 millions d’habitants), les recettes ont fondu de 40 % entre le début de l’année et la mi-mars. Début avril, l’Association des tour-opérateurs français (Ceto) a quand même annoncé la reprise des activités « sur l’ensemble des destinations touristiques » en Tunisie. Ce qui devrait limiter l’érosion du nombre de Français, deuxième groupe de visiteurs (1,4 million), derrière les Libyens, et donner aux professionnels des raisons d’espérer. Logiquement, les compagnies aériennes ont aussi réduit leur offre de vols, de 40 % à destination de la Tunisie à 32 % pour l’Égypte. Elles misent cependant sur l’élan de sympathie suscité par les révolutions pour relancer les réservations. Egyptair a ainsi mis en ligne sur son site et sur YouTube un clip promotionnel baptisé « Les Ailes de la liberté », dans lequel alternent des images de la révolution égyptienne, des pyramides et de plages de la mer Rouge. En parallèle, de jeunes Égyptiens ont lancé la campagne « Egypt is Safe » pour rassurer les visiteurs étrangers, affichant par centaines des pancartes autour des pyramides de Gizeh. Via les réseaux sociaux, ils font également savoir que les événements qui se sont déroulés sur la place Al-Tahrir représentent désormais « une raison de plus pour visiter l’Égypte ». Le site est même devenu une étape incontournable des circuits proposés par les voyagistes. En Tunisie, la campagne de promotion intitulée « I Love Tunisia », incitant les touristes à découvrir « la nouvelle Tunisie libre et démocratique », se décline chez les voyagistes (Fram, Marmara…), qui proposent des séjours à prix réduits. En février, le prix moyen d’un séjour a chuté de 15,6 % à 548 euros en moyenne, selon le Ceto. Des offres inédites (une place offerte pour une achetée) ont même été lancées. De toute évidence, les deux destinations ont entendu le patron du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, quand il soulignait début mars que leur santé économique « dépendait en partie de leur prochaine saison touristique ». « L’enjeu sera de voir si les touristes viendront […] ou s’ils auront peur », avait-il ajouté. Fin avril, l’Organisation mondiale du tourisme a promis d’apporter son concours à la mise en place dans les mois à venir de trois grands événements destinés à relancer l’activité touristique en Tunisie. Au même moment, le baromètre du site Internet de réservations Hotels.com voyait un premier signe de reprise : + 223 % de consultations pour la destination Tunis. En Égypte, marquée par plusieurs vagues d’attentats frappant ses zones touristiques (Charm el-Cheikh, en 2005, le Hilton de Taba, en 2004, Louxor, en 1997), les touristes n’ont jamais tardé à revenir.
Par Damien Zerka