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une image, une histoire

11 avril 1979
LA CHUTE D’IDI AMIN DADA

Par jmdenis - Publié en avril 2015
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C’EST L’HORRIFIQUE HISTOIRE DE « BIG DADDY », CET ANCIEN GARDIEN DE CHÈVRES ANALPHABÈTE QUI FINIT PAR ACCÉDER AU POUVOIR SUPRÊME EN OUGANDA. Il aura instauré un règne de terreur : assassinats en série, expulsions des ressortissants asiatiques, l’affaire d’Entebbe… Jusqu’au jour, qui lui sera fatal, où il décide de lancer un raid sur la Tanzanie voisine.

UNE FORCE de la nature, 1,90 m pour 120 kg. Un bouffon qui aura régalé le monde de ses déclarations farfelues, assénant que le Christ avait été cruci?  é par « des assassins sionistes » ou invitant, en 1976, son « cadet » Richard Nixon à venir en Ouganda pour « se remettre des affaires du Watergate ». Un personnage qui se fera appeler, par haine des Anglais, « le dernier roi d’Écosse » (voir le ?  lm éponyme de Kevin MacDonald, sorti en 2006). En fait, comme l’af?  rmait le cinéaste allemand Barbet Schroeder lorsqu’il présenta, en 1974, son documentaire Général Idi Amin Dada : Autoportrait, il n’était que le « miroir déformé » de l’Occident, le produit caricatural de la décolonisation et de son cortège de dictatures, de tribalisme et de faillites économiques…

Né entre 1923 et 1925 à Koboko, dans le nord-ouest de l’Ouganda, au sein d’une famille pauvre, Idi Amin Dada n’a pas la chance de fréquenter les bancs de l’école. En 1946, le petit gardien de chèvres analphabète s’engage dans l’armée de sa gracieuse majesté George VI d’Angleterre. Et en bon soldat « indigène » zélé, il commet ses premiers crimes lors de l’écrasement des insurrections nationalistes, celle des Mau Mau au Kenya notamment.

Avec l’indépendance de l’Ouganda en 1962, et sous l’égide de l’autoproclamé président Milton Obote, l’ex-sergent-chef est nommé général. Mais, bientôt, il y a un crocodile de trop dans le marigot du pouvoir. Et Idi pro?  tera d’un voyage du chef de l’État pour prendre le pouvoir le 25 janvier 1971. L’Occident approuve le putsch mais ne tarde pas à déchanter. Opposants et intellectuels sont torturés et exécutés… Durant le règne de « Big Daddy », près de 300 000 personnes seront éliminées.

En 1972, c’est sur un ordre de Dieu apparu en songe, affirme-t-il, qu’il donne trois mois aux Indiens et Pakistanais – détenteurs d’une bonne partie de l’industrie et du commerce nationaux – pour déguerpir du pays. Cinquante mille d’entre eux fuiront. La « perle de l’Afrique », comme l’avait baptisée Winston Churchill, est exsangue, l’in?  ation explose et la misère se fait endémique.

L’affaire de l’aéroport d’Entebbe, en 1976, replacera Idi au centre de l’actualité. Ardent partisan de la cause palestinienne, il accueille un avion d’Air France détourné par des membres du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), et qui assurait la liaison Tel Aviv-Paris. Un commando israélien libérera les otages, au nez et à la barbe du dictateur. Puis, en octobre 1978, celui qui s’était proclamé président à vie lance un raid afin de reprendre la Kagera, une région « con?  squée », selon lui, par la Tanzanie au moment des indépendances. L’armée ougandaise est défaite, ce sera son Waterloo. Les troupes ennemies entrent dans Kampala et Idi doit s’enfuir du pays le 11 avril 1979. Un cauchemar éveillé de huit ans prend fin pour l’Ouganda. Quand il se réfugie en Arabie saoudite où il mourra vingt-cinq ans plus tard, l’ogre de Kampala aura dévoré les forces vives de la nation.