
Afrosonica explore le son
Le musée d’ethnographie de Genève présente une magnifique exposition sensorielle, un voyage autour des connexions sonores qui font vibrer le continent et ses diasporas.

Le son est énergie. il est aussi un moyen ancestral de transmission des savoirs, des émotions et des mémoires.
Pour les peuples africains, il a représenté une force d’expression, de résistance et d’échange à travers les cultures, le temps et l’espace. Le musée d’Ethnographie de Genève invite à traverser les paysages sonores qui composent ces territoires pluriels avec une exposition innovante et ambitieuse, préparée durant deux ans et demi par une équipe dirigée par la conservatrice Madeleine Leclair et le DJ sud-africain Mo Laudi, avec la contribution d’une trentaine d’artistes et la mise en valeur de plus de 200 objets. Elle s’intitule «Afrosonica», un néologisme qui renvoie aux identités culturelles, aux luttes politiques et aux spiritualités du continent mais qui évoque aussi les dimensions multiples et expérimentales du son, dont le pouvoir est exploré à travers quatre chapitres musicaux et un espace de rencontre et de convivialité radical et décolonial, inspiré du imbizo des Zoulous (l’assemblée où régler les différends par l’écoute et la discussion).
Tout est calibré et conçu pour que l’on plonge corps et âme dans le parcours, en se laissant envoûter par les sons au fil de la déambulation libre d’un espace à l’autre. Ici, on découvre les vibrations de notre environnement et des matières, de la sonorité des pierres à celle de la ville.
Là, on aborde l’histoire de la musique et de sa circulation: les peintures rupestres du Sahara nous rappellent qu’elle est présente depuis toujours, et ses déclinaisons modernes, du jazz à la rumba congolaise, portent encore en elles un héritage puissant. Le volet dédié à l’intime évoque le pouvoir inspirant de la parole, de la musique à penser et du rapport profond des musiciens avec leurs instruments, qui ont aussi leur histoire.
Enfin, l’appel des ancêtres redonne la voix aux masques, recrée un espace sacré à travers le vrombissement de rhombes rituels, reproduit par un initié malien.
Soignée et pointue, riche sans être écrasante, Afrosonica mérite que l’on prenne son temps et prête l’oreille.