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HAPSATOU SY « Vive l’Afrique ! »

Par Michael.AYORINDE - Publié en février 2013
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C’EST L’ATOUT CHARME du moment de la télévision française! À 31 ans, Hapsatou Sy débarque sur D8, la nouvelle chaîne gratuite du groupe Canal+, dans l’émission « Le Grand 8 » confiée à Laurence Ferrari, ancienne présentatrice vedette de TF1. Pour cette quotidienne de commentaires de l’actualité sous toutes ses coutures, où l’humour et l’engagement donnent le ton, elle rejoint des personnalités diverses, au fort tempérament. Et rien que des femmes : la journaliste Audrey Pulvar et l’ancienne ministre de la Santé Roselyne Bachelot, aujourd’hui membre de la commission pour la moralisation de la vie publique. « Même si je suis une grande télévore, je ne viens pas du monde de la télévision, donc je n’avais pas la prétention de venir me présenter. C’est l’équipe de Laurence Ferrari qui est venue me chercher », précise d’emblée Hapsatou. Un nouveau défi pour elle, et de taille, dans un monde totalement inconnu, même si la jeune femme a déjà une expérience du petit écran : « “Le Grand 8” m’avait repérée avec l’émission “L’Inventeur”, sur M6, où j’ai été membre du jury.

Elle cherchait un profil de chef d’entreprise... » « Flattée et un peu apeurée » au départ, Hapsatou a pris le temps de la réflexion, mais a vite accepté : « Très rapidement, j’ai été en contact direct avec Laurence Ferrari. Ça a été un coup de cœur! J’aime la femme qu’elle est, sa ténacité, son fair-play, sa poigne... et elle est très sympa! » À l’antenne depuis dix jours, la nouvelle chroniqueuse confie qu’elle cherche encore ses repères : « J’essaie de comprendre ce monde de la télévision, il y a des termes que je découvre, je me familiarise avec les oreillettes, les prises de parole. J’aime le concept de commentaire de l’actualité entre femmes, où j’essaie de rester moi-même en étant entourée de poids lourds! » Fine, légère et élancée, Hapsatou Sy n’en est pas moins, elle aussi, un poids lourd dans son domaine. Battante et meneuse depuis son plus jeune âge, elle s’est lancée dans l’ouverture de ses salons de beauté, Ethnicia (rebaptisés aujourd’hui HapsatouSy), à seulement 24 ans. Depuis l’ouverture de son premier salon sur l’île Saint-Louis à Paris, en juillet 2005, et le deuxième prix du concours de l’innovation commerciale en 2007, seize autres espaces de beauté ont ouvert.

Petite déjà, la gamine, native de Sèvres et qui a passé son enfance à Chaville (Hauts-de-Seine) gérait sa « petite entreprise familiale ». « Dans l’immeuble où je vivais, il y avait une maison de retraite. J’allais rendre visite aux personnes âgées, je leur faisais des courses..., raconte-t-elle. J’étais une des gamines les plus riches de mon quartier! Du coup, je pouvais acheter les fournitures scolaires de toute la fratrie! » L’aînée de cette famille de quatre filles et quatre garçons a toujours joué « un rôle de leader ». Un goût de l’effort légué par ses parents. « Ma mère m’inspire, c’est une femme de décision. Elle a fait en sorte qu’on ne manque jamais de rien et, bien que j’aie grandi dans un milieu modeste, j’estime que je fais partie d’une des familles les plus riches de France! » Quant à son père, il a quitté son village d’Orkadiere (nord du Sénégal) pour « conquérir la France et faire en sorte [que sa famille] ait un avenir meilleur. C’est un schéma de conquête. De toute façon, on conquiert sa vie... » Hapsatou, elle, s’apprête pour la première fois à se lancer sur le marché africain, avec l’ouverture, d’ici à la fin de l’année, d’une franchise à Luanda, la première sur le continent. Pour elle qui n’a découvert le Sénégal qu’à 18 ans, c’est le territoire de demain, celui des opportunités : « Les Africains ont envie de consommer, d’exister... » Quand on lui fait remarquer que, depuis quelque temps, ce continent « est à la mode », son visage calme s’agace un peu : « Il n’y a pas si longtemps, on y venait pour le piller, il était déjà à la mode! Et ça continuera demain, ce ne sera pas l’Inde, ni la Chine. » Qu’a-t-elle pensé de la visite de François Hollande dans son pays? « C’est surtout le discours de Youssou Ndour qui m’a plu. On a envie de regarder vers l’avant, on n’a plus envie qu’on nous bassine avec le passé, ou qu’on s’ingère dans nos affaires, y compris dans les discours. » La jeune entrepreneuse, qui a posé le pied sur le continent en 1999 en ayant « l’impression de rentrer chez [elle] », se dit « hallucinée de la vitesse à laquelle l’Afrique bouge ». Pas question de négliger cette culture, au contraire. « Le Sénégal est mon pays, au même titre que la France », s’enorgueillit-elle, expliquant qu’elle « porte le pagne à la maison », « parle peul couramment », a même pris des cours, et n’envisage pas de ne pas transmettre cet héritage à sa future progéniture.

Pense-t-elle justement aux enfants? « J’ai déjà l’impression d’avoir accouché de mes sept frères et sœurs, plaisante-t-elle. Les enfants, ce n’est pas pour tout de suite. Ce qui est sûr, c’est qu’à ce moment je mettrai tout entre parenthèses. » Trouvera t-elle le temps, d’ailleurs, elle qui semble vivre à deux cents à l’heure? « Ah! mais je dors, oui! nous rassure-t-elle. Je vis, je mange, j’ai une vie équilibrée. Et en tant qu’entrepreneur, j’ai la liberté de me lever à 10 heures si j’en ai envie, ou de rentrer chez moi faire une sieste. Bon, avec “Le Grand 8” ça va être plus compliqué! Mais je ralentis régulièrement, c’est essentiel : je fais du sport, de la musique, vais à des expos... J’ai assisté à la Black Fashion Week de Paris, j’ai trouvé ça extraordinaire, du grand art! » Un événement de plus, s’il en fallait encore, pour alimenter la devise d’Hapsatou Sy : « Vive l’Afrique! Croyons en nous! »

Par Sarah ELKAÏM