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Smaïn

« Je suis le premier à avoir cassé les verrous »

Par Maya Meddeb - Publié en mars 2015
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Demandez à Smaïn ce qu’il a fait ces dernières années, il vous répondra avec fulgurance : « Beaucoup de choses ! ». Des tournées avec ses amis humoristes à l’écriture de livres pour enfants, le comique d’origine algérienne ne s’est jamais arrêté. Rencontre.

AM : Vous avez une actualité très chargée en ce début d’année…
Smaïn : Effectivement, je suis en train d’écrire mon troisième conte musical pour enfants et de préparer un one-man-show. De plus, en mars, je suis à l’affiche de deux films, Certified Halal de Mahmoud Zemmouri et Les Portes du Soleil de Jean-Marc Minéo. Ce long-métrage raconte l’histoire d’un ancien de l’OAS [Organisation armée secrète, ndlr] qui entreprend une opération mafieuse pour récupérer à tout prix les cabarets que possédait son père quand l’Algérie était française. C’est une sorte de James Bond à l’algérienne.
Le tournage a eu lieu à Oran. C’était une première pour moi de me glisser dans la peau d’un méchant. La chanteuse Lorie interprète mon assistante, elle joue à merveille le rôle de tueuse. Mike Tyson fait aussi partie du casting ! Il joue son propre rôle, c’est un homme d’une extrême gentillesse.

Vous avez tourné dans 28 films, quel est celui qui vous a le plus marqué ?
Il y en a deux. L’Œi l  au beur(re) noir en 1987, avec Pascal Légitimus, parce que c’est le premier. Et puis il y a Harkis d’Alain Tasma, sur l’histoire de l’Algérie.


Quel regard portez-vous sur l’humour d’aujourd’hui ?
L’humour est une photographie immédiate de la société. Quand j’ai commencé, j’étais un humoriste de son temps. On parlait alors des « Beurs ». Je suis le premier à avoir cassé les verrous, à avoir ouvert cette porte. Aujourd’hui, l’humour est devenu plus sarcastique et provocateur. Les mœurs ont sauté. Le constat que je fais, c’est qu’il y a une montée du communautarisme qui crée une vraie scission entre les gens, en fonction de leur milieu social, de leurs origines. Il n’y a plus cette France que j’aimais, unique et universelle.


Jamel Debbouze, c’est votre petit frère de scène ?
Oui, je pense. J’aimerais bien bosser avec lui ! Il a d’ailleurs joué dans Les 2 Papas et la Maman que j’ai réalisé en 1996. C’était sa première apparition au cinéma.


Dieudonné a déclaré « Je me sens Charlie Coulibaly » après les attentats qui ont été perpétrés à Paris, début janvier. Qu’en pensez-vous ?
C’était une provocation malvenue. Je peux comprendre que des gens aient été choqués. C’est horrible quand le rire divise. Chacun son école. Pour moi, le rire c’est l’unité et le partage. On ne peut pas empêcher les gens d’avoir des convictions, on est en démocratie. Mais il endosse un rôle d’humoriste qui me gêne, dans lequel je ne me reconnais pas. Tu as le droit de dire que tu n’aimes pas la politique de Benyamin Netanyahou, que les Palestiniens vivent dans la souffrance, mais tu ne peux pas dire que tous les juifs sont comme ci ou comme ça… C’est comme ces idiots qui agressent des juifs parce qu’ils pensent que tous les juifs sont riches ! Qu’ils s’attaquent aussi aux mecs du Qatar dans ce cas-là ! Dieudonné divise. Mais la France est une entité dans laquelle il y a plein d’identités, c’est cela qui fait sa richesse.


Quel est votre rapport avec l’Algérie ?
C’est un rapport d’affection pour moi qui suis né à Constantine. J’y voyage souvent. Et j’y suis également allé pour l’avant-première du film Les Portes du Soleil.