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Mouna Jemal Siala

Regards croisés

Par - Publié en février 2016
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Propos recueillis par Loraine Adam

Sa formation est à l’image de son travail, volontariste : après une maîtrise en arts plastiques obtenue à l’École nationale supérieure des beauxarts de Paris, elle soutient sa thèse à l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne. En vingt ans, cette artiste née en 1973 à Paris a glané de nombreux prix et multiplie les expositions en Afrique, en Europe et aux États-Unis. Désormais basée à Tunis, elle enseigne les arts plastiques à l’Institut supérieur des beaux-Arts.

 
AM : Quel a été votre premier choc esthétique ?
Mouna Jemal Siala : Peut-être le récit de Dominique Noguez publié en 1993, Les trente-six photos que je croyais avoir prises à Séville. Sa pellicule ayant été mal amorcée dans son appareil, il publie trente-six textes s’appuyant sur des cadres vides. La photo absente, c’est le récit qui se substitue à l’image. Le choc, c’est donc, la présence-absence de l’image.
 
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Mon quotidien, ma famille, mon pays, ma vie. Tous les changements, qu’ils soient positifs comme la naissance de mes triplés en 2003, ou négatifs à l’image de l’actualité politique avec les risques que faisait planer sur le pays l’obscurantisme, sont une source d’inspiration. 
 
Quels sont les artistes dont vous vous sentez proche ?
Plusieurs me viennent à l’esprit : Christian Boltanski, le photographe allemand Andreas Gursky, la vidéaste iranienne Shirin Neshat, l’artiste égyptienne Huda Lutfi, ou la conceptrice italienne Romina de  Novellis… 
 
Quel esprit guide votre travail ?
L’envie de créer, la nécessité intérieure, comme l’a si bien formulé Kandinsky. Le sujet peut être un autoportrait, des citoyens ou l’environnement politique… Et le matériau, la photo, la vidéo, l’installation  ou même un objet. Le résultat de mes expressions visuelles provoquera par la suite un questionnement sur un malaise ou sur une joie.
 
Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?
Une série de photos sur l’environnement naturel et politique… L’exposition itinérante d’art contemporain tunisien pour la paix Mad’in Peace, au Musée d’art contemporain de Montélimar. Ma série de photographies citoyennes Non à la division, bientôt présentée à Londres. Et j’espère aussi être sélectionnée pour le prochain Dak’Art Biennale en mai.
 
Une anecdote liée à l’élaboration de l’une de vos oeuvres ?
En 2013, je prenais en photo des citoyens avec une ligne que je leur traçais longitudinalement sur le visage. Parmi eux, il y avait un vieux paysan qui ne voulait pas du crayon noir parce que c’est du  maquillage pour femmes. Il s’est finalement prêté au jeu, avec bonhomie, pour dire « Non à la division ».
 
Quel commentaire revient le plus souvent sur votre travail ?
Il vient d’un spectateur tunisien : « Je trouve intéressant votre travail ! Vous arrivez à vendre ce genre d’art ? »
 
Le plus joli compliment que vous ayez reçu ?
Bravo binti (bravo ma fille),  de la part de mes parents.