Totems à porter
Spirituelle et urbaine, la collection-manifeste de Judicaël Wahouie jongle entre lignes sculptées et formes voluptueuses, valorisant joyeusement les masques ivoiriens.
La nouvelle collection du designer ivoirien Judicaël Wahouie, «Totem d’étoffe», est un véritable manifeste. Elle est l’aboutissement d’un travail de réflexion qui a duré près de trois ans et qui est né d’une volonté de moderniser et de rendre plus accessibles les habits de cérémonie, les transformant en vêtements urbains, adaptés à des contextes formels comme quotidiens. Ils incarnent l’idée d’afroluxe, qui affirme et met en avant un héritage culturel et spirituel symbolisé visuellement par le masque. Ou mieux, les masques. Car le designer a travaillé avec les maîtres menuisiers de Grand-Bassam pour miniaturiser et incruster habilement dans chaque pièce des masques en bois différents, issus des multiples régions et peuples de Côte d’Ivoire. Et si les tons clairs de la saison participent à faire ressortir la beauté de ces petites oeuvres d’art sculptées à la main, les tissus témoignent également du brassage culturel cher au designer, qui se sert de pagnes tissés, sourcés dans le nord ou dans le sud du pays, mais aussi de cuir ou de similicuir. Un moyen de faire un clin d’oeil à l’Europe et aux diasporas, qui ont su s’approprier depuis longtemps ces matières, les adaptant à leurs tenues. Judicaël Wahouie, trentenaire passé par Uniwax en début de carrière, a lancé sa marque éponyme il y a dix ans et ne s’est tourné vers le prêt-à-porter que très récemment. Pourtant, sa façon de décliner structures et volumes, de jouer avec les contrastes entre textures et couleurs, ou son recours espiègle à des matières comme la toile de jute raffinée ou le raphia, que l’on retrouve encore dans cette collection, lui ont très vite permis de créer un style reconnaissable et glamour. Avec cette dernière capsule, caractérisée par des silhouettes bigarrées, où se côtoient pièces structurées et tenues vaporeuses et légères, il impulse une nouvelle identité à son label, qu’il imagine puissante, décidée et ancrée dans les traditions spirituelles du continent.
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