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Beau livre

Un voyage dans le temps

Par Sophie Rosemont - Publié en octobre 2021
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Un très bel ouvrage qui nous projette sur le parcours de 300 ARTISTES du continent depuis… 1882.

DÈS L’INTRODUCTION, Chika Okeke-Agulu, artiste et professeur à Princeton, répond à la question que l’on se pose d’emblée : comment délimiter le territoire africain dans ce répertoire de personnalités créatives, qui ont en commun ce seul et même continent fait de multitudes de singularités ? « Alors que le champ de l’art africain en général a été essentiellement limité à l’Afrique noire et subsaharienne – en grande partie à cause de l’ethnographie coloniale et de l’anthropologie culturelle –, l’histoire de l’art africain moderne et contemporain qui a émergé à la fin du XXe siècle est à l’échelle du continent : il englobe l’art et les artistes florissants de l’Afrique du Sud à l’Égypte, du Sénégal à l’Éthiopie. » Les choses étant dites, on peut se plonger, par ordre alphabétique, dans les portraits de 300 peintres, photographes, sculpteurs et autres plasticiens, de Hamed Abdalla à Portia Zvavahera. Certains de ces noms sont très connus : Leila Alaoui, Rachid Koraïchi, Chéri Samba, Omar Victor Diop, ou encore les légendaires Malick Sidibé et Seydou Keïta.

VERTIGO SEA © JOHN AKOMFRAH / © SMOKING DOGS FILMS. AVEC L’AIMABLE AUTORISATION DE SMOKING DOGS FILMS ET LISSON GALLERY
VERTIGO SEA © JOHN AKOMFRAH / © SMOKING DOGS FILMS. AVEC L’AIMABLE AUTORISATION DE SMOKING DOGS FILMS ET LISSON GALLERY

D’autres le sont peut-être un peu moins, mais ont été exposés par de grandes institutions hors frontières : Keyezua, Mohamed Bourouissa, Cassi Namoda, Cinga Samson, Marcia Kure… Chacun est présenté dans un court texte accompagné d’images emblématiques de leur corpus. Et comme le souligne Chika Okeke-Agulu, tous « restent imprégnés d’une certaine idée de l’Afrique, conscients des liens complexes qu’elle entretient avec le reste du monde ». Plus de 30 conseillers et 50 auteurs se sont investis dans ce travail quasi encyclopédique, dont l’objectif est d’ouvrir des fenêtres nouvelles sur les créateurs cités. Ce beau livre offre un panorama d’une rare richesse éclectique, revenant sur ce qui a créé l’art contemporain : un hier marqué des traumas, stigmates et combats cruciaux des années 1960.

En cela, il permet de coucher sur papier des noms défendus par des centres artistiques qui ne cessent de prendre de l’ampleur à Abidjan, Rabat ou encore Lagos. Enfin, un précieux glossaire définissant l’afrofuturisme, le Black Arts Movement, le kente, le Mbari Club ou encore l’école de Khartoum complète cet ouvrage dont la fragmentation n’entame guère la belle densité des oeuvres abordées.