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Pour qui sonne le Bombolong?.DR
Pour qui sonne le Bombolong? .DR
Film

Pour qui sonne le Bombolong?

Par Jean-Marie Chazeau - Publié en mars 2024
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Un vétéran du cinéma Africain raconte dans un film puissant, mêlant archives et fiction, une guerre d’indépendance qui n'a pas su tenir ses promesses…

NOME (Guinée-Bissau), de Sana Na N’Hada. Avec Marcelino António Ingira, Binete Undonque, Marta Dabo. En salles.DR
NOME (Guinée-Bissau), de Sana Na N’Hada. Avec Marcelino António Ingira, Binete Undonque, Marta Dabo. En salles.DR

Sana na N'hada a fait ses armes de cinéaste à Cuba dans les années 1960 avec plusieurs compatriotes, dont Flora Gomes, avant de rentrer en Guinée-Bissau, filmer la guerre menée contre l’armée portugaise dans les mangroves et les forêts de son pays…À73 ans, il intègre ces images d’archives, rescapées parmi plusieurs kilomètres de pellicules perdues, dans son nouveau longmétrage, en racontant l’histoire du jeune Nome, forcé de rejoindre la guérilla en 1969. Il mélange, avec des teintes très particulières, les époques et les questionnements sur cette guerre de libération de onze ans. Elle devait aboutir à la naissance d’un État au service de tous, mais elle a tourné au règlement de comptes entre combattants, avec la mort d’un leader prometteur, Amílcar Cabral, juste avant l’effondrement du pouvoir militaire colonial au Portugal.

«La Guinée est-elle prête pour tant de bonheur?», s’interroge un personnage fantomatique, esprit à la peau noire et au masque blanc, qui parcourt le film tandis que résonnent les bombolongs transmettant leurs messages de village en village. Nome, rentré chez lui en héros, va devenir amer, puis cynique… Le cinéaste explique : «On me reproche de toujours parler de la guerre [en Guinée-Bissau]. Ce fut un moment terrible et je ne veux pas passer ma vie à en faire le récit. Je le fais néanmoins […] car on continue de se haïr et de s’entretuer.» Son film, qui allie superbement réalité, mémoire et fantastique, n’est pas seulement un témoignage de première main, c’est aussi une très belle mise en scène au service d’un pan oublié de l’histoire des indépendances africaines et de leur «espérance contre la cupidité et le mal».